D’aucun penseront que ce confinement est une situation inédite dans notre vie.
N’avons-nous pas déjà vécu cette période dans nos vies ?
Et quand je dis nous, je parle de la moitié de l’humanité, et dans cette moitié encore à une partie seulement. Je parle des 9 mois de grossesse ! Moi je dis que 41 semaines, 290 jours, presque 7000 heures coincée avec notre petit gigot dans le bidon, cela vaut bien un confinement.
En préambule de ce billet, il n’est pas pensable que vous pensiez que je vais comparer un événement mondial avec un enjeu létal avec une grossesse qui est (pour une partie d’entre nous une expérience heureuse. )
Il n’est donc pas question de comparer l’incomparable face à une situation où le chagrin s’empare de ceux qui ont perdu un proche, où la pugnacité et l’engagement des soignants font l’honneur des nations , où l’économie mondiale se retrouve blackboulée, où les petits business crées à la force de l’âme et du poignet se retrouvent dans une situation catastrophique.
En France, même si tout es perfectible nous vivons néanmoins dans l’indécence d’une confinement optimal, loin de l’enfer qui attendent par exemple les populations africaines ou indiennes , de tous ces pays qui n’ont pas assez d’infrastrucures médicales pour accueillir une population qui déjà vit majoritairement dans la misère sans covid. En RDC on compte moins de 10 respirateurs dans la capitale par exemple. Voilà.
En 9 points je vais néanmoins oser le comparatif entre les deux
Point N°1 : La sidération
Quand vous avez appris que vous étiez enceinte, que vous ayez gardé le bébé ou non, n’avez-vous pas ressenti au delà de la joie ou de la panique, un moment de sidération ? Voire presque un moment de déni ? Le « c’est pas possible « et toutes ses déclinaisons n’a-t-il pas résonné dans vos toilettes quand vous avez vu la petite bande bleue sur votre test urinaire ?
Le déni est la stratégie d’auto-défense qui nous permet d’affronter une réalité qui peut être insupportable , de la faire disparaitre façon David Copperfield et de faire naitre une néo-réalité. ( c’est en tout cas avec mes mots la définition donnée par Mr Freud)
Qu’il soit bref ou qu’il ait duré, ce moment a été vécu par bon nombre d’entre nous.
Par ailleurs j’ai entendu un médecin ce matin expliquer que le choc du confinement pouvait provoquer une aménorrhée… Hmmmm J’aurai du lui poser la question sur la ménopause …
Point N°2 : On est tous des experts
Quand on annonce sa grossesse, votre mère, pire votre belle-mère et les copines deviennent illico des médecins,sage-femmes, infirmières en puissance et s’imposent expertes es grossesses et es accouchement.
Elles deviennent le Vidal du ventre rond, savent quels médicaments à prendre ou à éviter, et vous abreuvent de conseils de grand-mère et de remèdes miracles. Et à force de parler de tout ce qui peut vous arriver comme tuile pendant ces 9 mois, le climat devient complètement anxiogène.
Avec le COVID 19, les conversations du café Du commerce des réseaux sociaux voient apparaitreEx nihilo une nouvelle génération d’experts a prêté le serment d’Hippocrate en l’espace d’une nuit.
Et chacun y va de sa petite phrase , les serial facebookers et twittos sont devenus des ultra pros de la chloraquinine, ,connaissent tout du professeur Raoult, imposent des grands débats « pour ou contre le druide de Marseille « ? Et de donner au gouvernement des leçons de santé, d’économie et j’en passe. La social media sphère compte désormais au total plus 4 milliards de spécialistes de la crise sanitaire, écologique et économique. Avec ca, on est parés.
On frise l’exogénose covidienne donc on arrête de regarder BFM TV, on met les conversations What s app en sourdine de la même manière qu’on a envoyé paitre les bonnes copines qui vous ont saoulé en vous abreuvant de conseils
Point N°3 : On se sent vulnérables
Bien entendu , la maternité n’est pas une maladie mais elle peut en revanche nous amener son lot de petits et grands maux selon notre métabolisme.Et la liste des emmerdes liées à la grossesse est longue. Bref on se sent vulnérables et c’est la qu’intervient mon point de comparaison.
Vulnérable la femme enceinte qui va désormais faire attention aux aliments interdits, à se protéger des gens qui éternuent, à virer le chat pour pas choper la toxoplasmose.
Vulnérables les confinés les enfants à protéger, les proches plus vraiment proches géorgraphqiueemnt qui sont loin à surveiller.
Vulnérable au virus qui rôde et peut se cacher sur l’emballage des paquets de pâtes ou du PQ.
Je parle aussi de la vulnérabilité psychologique de l’être : son vacillement et une sinusoïde d’humeurs au fur à mesure des jours : pour preuve, à lire sur sur les réseaux quand une personne lance le « et vous, que ressentez-vous aujourd’hui » ?
De la joie de se retrouver avec les siens à la maison, ou l’impression qu’on va jamais tenir sans buter son gosse qui joue à Animal Crosssing à deux cm de votre oreille en pleine réunion Zoom, de l’angoisse de se retrouver à confiner tout seul , ou la panique de se retrouver tout court, avec soi-même alors qu’on passe sa vie à remplir les cases vides de notre emploi du temps.
Dès lors, le Covid met en exergue notre vulnérabilité face à l’isolement social;
Point N°4 : On bouffe tout le temps ou on arrête de bouffer.
Avec l’injonction médicale « tu ne prendras pas 30 kgs comme Esther », la femme enceinte surveille son apport calorique comme une instagrameuse son nombre de like.
Mais c’est un fait, confinés, on bouffe on bouffe puis on culpabilise de bouffer.
Enceinte, on bouffe, on bouffe et on culpabilise de bouffer : Puis on se dit « hé c’est bon, j’ai renoncé à la clope et à l’apéro, j’i renoncé aux huitres et au fromage au lait cru donc sur le reste foutez moi la paix. »
Confinés on se dit « oui bon ben si on supprime la bouffe et les apréos, il reste quoi à part les devoirs du CM2 ?
D’ailleurs petite parenthèse covidienne : on voit naitre depuis le début de cette inédite ère une injonction à ne pas grossir que l’on peut qualifier presque de grossophobie : certaines instagrameueses projettent des photos d’elles avec 20Kg de plus lorsqu’elles sortiront du confinement et émettent des « Oh AH qu’est ce que c’est moche »
Être grosse est donc un truc à ne pas devenir : être gros est donc d’une manière syllogique une tare. Et là on frôle un de mes points Godwin sur le respect d’autrui. La grossophobie prend des pont pendant ce confinement.
Ce confinement à l’instar de la grossesse peut provoquer des troubles du comportement alimentaire ( boulimie , anorexie) , dus à nos variations d’humeur :
Le confinement comme la la grossesse peut nous amener à identifier une perte de contrôle de notre vie. ( Clairement aujourd’hui c’est l’état qui contrôle quand et pourquoi nous pouvons sortir, partir en vacances , et dresse la liste très précise des interdits.)
Enceinte j’ai pu ressentir cette perte de contrôle de ma vie, de son orientation, de la liberté ( liberté pour laquelle je pars au combat tous les jours) : total j’ai pris 30Kgs
Ou à l’inverse on peut tomber dans un hyper contrôle de son rapport à la nourriture : être à tout prix une femme enceinte parfaite , à boire des smoothies dégueu mais parfaits pour le bébé, Le contrôle des calories à tout prix devient dès lors la réponse à l’injonction bien française de ne pas grossir, à l’injonction du corps médical et des gynécologues en particulier .
Et on voit fleurir sur les réseaux les Best practices pour réduire drastiquement ses calories et surveiller son poids.
Et je ne parle même pas de la pléthore de cours de gym..
Warning : Pas question ici de comparer les problèmes des personnes qui ont hors confinement ont un trouble du comportement alimentaire avec la prise de kgs d’une femme enceinte mais de regarder par un autre prisme les injonctions du bien-manger mis en exergue par le confinement
Point N°5 : Je dois pas le faire mais je le fais quand même
Pas pire pour un français de s’entendre dire « t’as pas le droit »
C’est comme marquer sur un dossier dans ton PC familial « Ne pas ouvrir », ca provoque délibérément l’effet inverse.
Avez-vous vu le nombre de nouveaux joggers dans les rues ? D’un coup ils ont ressorti leurs vieilles Nike pour faire la nique aux policiers. « J’ai pas le droit ben je le fais quand même »
Le confinement ou la grossesse nous imposent des changements de rythme de vie. Ils nous condamnent tous deux à faire fi de notre liberté individuelle. Et pour une partie de nous, enceinte ou confiné(e), cette interdiction peut faire monter des vagues d’insolence et d’insoumission.
Non Esther, monter sur une échelle pour repeindre la couloir à 6 mois de grossesse, je te l’interdis . Tu me quoi ?( true story) . Quand on a vu Wuhan en confinement on a du être une pelletée à penser que ca ne pourrait jamais marcher en France avec nos cerveaux français. Du coup au lieu de jouer à la Wi, les français se sont barrés aux Buttes Chaumont pour faire pique nique. Et toi la femme enceinte qui m’écoute, c’est pas le moment d’aller tailler ta haie à 2 mètres de hauteur.
Point N°6 : La solitude de la femme enceinte qui est deux
Etre enceinte signifie ne pas physiquement être seule.On est à minima 2 à se mouvoir, à écouter de la musique, à manger etc…. J’ai même envie de dire qu’on est même pas toute seule à faire l’amour…
Vivre en confinement ( et là bien sur je ne parle pas de celles et ceux qui vivent le confinement en solo) c’est accepter cette même promiscuité 24/24 7/7/
C’est ne pas pouvoir s’isoler sauf si on habite Westminter. C’est être dans l’obligation de cohabiter.
Rechercher l’isolement, un moment de paix, d’ataraxie dans ce contexte est plus compliqué que tous les épisodes de Kho Lanta compilés. J’en ai même entendu certaines proposer une activité « récurage des joints de la cuisine à la brosse à dents » pour être sure de gagner quelques heures de quiétude.
Cinfinemtn 1- femme Enceinte 0. Vous avez trouvé quoi vous pour vous enfuir quelques minutes ?
Point N°7 : Tu es créative comme jamais
Alors je sais pas vous mais moi enceinte de Pauline ma première, je me suis découverte des talents comme jamais.
Alors que je ne savais pas coudre un bouton, je me suis retrouvée à coudre protège tétines, protège bib, édredon, rideaux etc.. Je crois même avoir fait des créations tricots et broderie. Une fois accouchée, tout est rentré dans l’orre.
Et bien bim pareil, tout le monde confiné se découvre un talent caché ! Tapissier, peintre, couturier, j’en connais même une qui prend des cours pour dessiner des perspectives.
Et ca c’est génial. Comme dirait la mère de napoléon, pourvu que ca dure.
Point N°8 : A quelques semaines près, tu sais pas quand tu seras délivrée
Ah penser l’accouchement comme un déconfinement : l’épreuve de sortie dont on connait pas vraiment la date à 2 mois près. Sur le qui -vive permanent, je sors cet après midi ou je risque de perdre les eaux chez Zara ? Je programme la bar mitsvah du petit dernier ou on sera encore confinés ? Chérie t’auras accouchée pour qu’on puisse partir en vacances ? Chais pas on sera encore confinés…Bref accouchement ou déconficnemtn , même combat, mêmes incertitudes. On attend les interventions d’Emmanuel Macron comme on chronomètre le temps entre deux contractions.
Point N°10 Les promesses after-confinement
Les belles promesses fleurissent sur les réseaux sociaux : Qu’elles soient professionnelles ( dès qu’on est sorti du bordel, je me fais une formation ébéniste et je quitte Cap Gemini) , qu’elles soient humanitaires ( à la rentrée, je m’inscris comme bénévole à la croix rouge), ou de l’ordre de l’intime : ( Fuck, comme je vais quitter ce gros lourd qui m’a fait perdre 10 ans de ma vie, plus Jamais de confinement avec lui sinon je vais le buter) , ou du corporelles : « Je m’inscris à un club des Yoga Pilates, j’ai découvert ca pendant le confinement, comment j’ai pu vivre sans ! «
Et bien c’est à peu près ce que se disent les jeunes mamans sorties du post partum : « Maintenant que je suis mère, je vois la vie autrement et vous allez voir ce que vous allez voir ! » Certaines ont déménagé pour un lieu plus tranquille, d’autres se sont inscrites au club med Gym et d’autres encore à un club de poterie céramique très en vogue avant le confinement .
Question existentielle : Que faire de ce nouveau moi ? Que faire de ce moi post-confinement ? On voit fleurir des émissions et des débats sur « le jour d’après » . Comme une renaissance.
Alors comment assurer la transition ? Comment repenser son rapport aux autres dans cette nouvelle identité ?
Je suis une heureuse pessimiste (ce qui me vaut de ne jamais être déçue et de me réjouir à fond des bonnes surprises) mais dans ce dysfonctionnement de l’économie mondiale , peut-on croire une obligation de changer les donnes ? Moi je crois plus en la loi de l’inertie, de la non-rupture et du légendaire Business as usual. Et vous, vous y croyez à la décision de rupture ?
Néanmoins, indiviviuellemt serons nous quand même forcer de repenser notre rapport à l’autre, de repenser l’altérité.
Devenir mère, devenir père remet en cause les relations que nous entretenons avec nos géniteurs. Et aujourd’hui que ces derniers sont loin de vous, isolés , certains découvriront le manque ou au contraire enfin la paix, sortir des sacro-saints déjeuners du dimanche, s’en sentir libérés, déconfinés dans son confinement .
Accoucher, déconfiner ou rebouger les curseurs de ses rapports à l’humanité. Cet autre vous en confinement , cette femme qui devient mère.
Alors mesdames qui avaient eu la gentillesse de m’écouter jusqu’au bout, allez vous faire entendre ce podcast pour que nos hommes comprennent , via le confinement , ce qu’est une grossesse et un accouchement ? Qu’ils prennent le temps de comprendre nos folies et nos envies, nos sautes d’humeur..
Hey man écoute le podcast EEMTF et tu seras ce que c’est d’être enceint.
Allez je pousse un dernier coup de gueule
Et pour toutes celles qui ne veulent pas d’enfants, en tout cas maintenant, et qui sont enceintes, poussons un coup de gueule suite au refus du Sénat en France d’allonger les délais d’IVG en cette période inédite.
Période où les centres de plannings familiaux sont fermés et où les hôpitaux sont mobilisés et on lame comprend par les malades du covid mais loù du coup es infrastructures chirurgicales IVG sont fermées , par manque de matériel et de personnel.Si on accepte que les bureaux de tabac soient considérés comme commerces essentielles , on doit pouvoir comprendre qu’un IVG est une mesure d’urgence et essentielle.Alors surveillez vos règles les filles, et tentez dès que possible l’IVG médicamenteuse en demandant une télé)-consulration.
Prenez soin de vous, stayathome
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Ecrit par Esther Pi, avec la complicité de Juliette Jouannet Naturopathe, Mixage K Moreaux, Musique Many Kinds Design