#01 Le mois du blanc

Janvier c’est le mois du blanc.

C’est la tradition, moi j’ai toujours connu ça. Grands magasins et supermarchés vont nous envahir de couettes, protèges matelas, oreillers à mémoire de forme et housses de couettes en lin ou en chanvre au prix du kg de safran. Histoire de nous engoncer dans nos hivers et nous faire voir la vie en rose, enfin en blanc. Le mois du blanc comme pour nous refaire une virginité après les agapes, pour faire passer le vin blanc justement. Le blanc couleur virginale, celle qui va nous absoudre de nos pêchés de l’année dans la bousculade des bonnes résolutions de début d’année. En général, ça s’arrête à l’épiphanie où on va se gaver de frangipanes avec un coup de champ’, parce que ça faisait longtemps quand même, nan ? Moi je suis de celles qui pensent qu’il est toujours l’heure de l’apéro quelque part dans le monde. Soit, je rechercherai l’absolution dans le champagne rosé. 

En 1965, je n’étais pas née, et la sublime Françoise Hardy chantait « Mon amie la rose » pendant 2MN14. Son ovale parfait, ses yeux d’amande fragile et sa bouche picturale font une analogie de la vieillesse avec cette fleur. Françoise Hardy a la beauté des immortelles et elle parle à 21 ans de la vieillesse qui l’attend. « On est bien peu de chose et mon amie la rose me l’a dit ce matin. Tu m’admirais hier et je serai poussière pour toujours demain. » susurre Françoise, prénom perdu dans l’oubli des yéyé que l’on n’a même pas connu. Je trouve que quelque part, cette chanson est assez grotesque, ridicule et précoce. Ce qui me choque le plus est le côté inféodé de cette rose, inféodé à son créateur, inféodé à l’homme et la beauté comme seule revendication possible de son être. Maman si tu me lis, je trouve qu’on a quand même clairement formaté les femmes de votre génération, mises dans des cases et avec une grande difficulté pour en sortir. En 2020, on a clairement passé un cap. Après je reste émerveillée par la prestation de Françoise Hardy et opte moi aussi pour la philosophie du vivre au jour le jour, Life is so short etc… Moi j’ai réduit cela à l’expression : Et en même temps fuck, chacun son style ! Chacun son talent. 

J’ai voulu ce premier mois de Et en même temps fuck, rose pour bousculer, pour prouver que le rose n’est pas forcement poudré, pas forcement signe de douceur mais qu’un index relevé peut être l’emblème d’une démarche pacifique pour dire : « et stop les gars ! ». Car comme dit notre ami Alain Souchon dans son dernier opus « je suis PRESQUE ». Presque rose, presque girly parce que je ne peux PAS marcher sur des talons de plus de 2 cm. Vous avez déjà fait le trajet Métro Montparnasse Gambetta en stiletto sans risquer les urgences traumatiques? Et à la fois, je porte quand même de la lingerie en dentelle Livy. Presque une femme car il m’arrive de m’oublier dans mes devoirs de Maman, presque une mère parce que je rentre bien trop tard du bureau, presque une amante car j’estime que je n’ai pas eu assez d’orgasmes cette semaine, enfin ce mois-ci. Et « presque » ce sera le sujet du premier podcast invité autour du livre « Avoir un enfant à 40 ans ou presque » paru aux éditions Eyrolles. J’aurai le plaisir de recevoir une de ses co-auteures Agathe Girod-Roux qui viendra nous parler des grossesses quadra.

Alors Mesdames, en préambule, une question : Qu’est ce qui nous a poussé à enfanter alors qu’on était bien pépouze dans notre vie de célibataire ? Quelle folie nous a conduite à faire le petit dernier alors que les grands commençaient enfin à nous lâcher un peu et qu’on avait PRESQUE une grasse matinée le dimanche ? Et moi qu’est ce qui m’a pris de faire deux filles à 20 ans d’écart ? À croire que j’avais vraiment envie qu’on me prenne pour la grand mère ? « Hein ah non monsieur je suis la mère des 2 figurez-vous ». Vous ne voyez donc rien ? Ce corps que j’ai dû remodeler à force de cabillaud-brocolis vapeur pendant des mois ( bah oui aussi, prendre 25 kgs c’était pas une bonne idée mais sur le coup, fallait pas me faire chier avec le comptage des calories, parce que : abandonner le formage au lait cru, le bourgogne et la clope était déjà un sacrifice suffisant). Je me rappelle quand même de mon gynécologue me disant « à votre âge, manger une pomme dans la journée c’est déjà presque trop de sucre… » Fuck

Bref ce corps donc, cher monsieur, à remodeler pendant les interminables sessions d’échauffements de boxe qui m’ont rendues exsangues, à jouer les Véronique et Davina avec des filles à qui ces prénoms ne disaient évidemment rien. Puis les séances de yoga chien tête baissé pour tenter en vain de retrouver un courbé fessier callipyge ? ça se voit donc pas ? Bon ok, vous êtes un gentleman et vous me regardez dans les yeux alors ça ne compte pas. Oui oui oui ce sont bien des rides que vous voyez là et oui j’en avais moins avec 25 kgs de plus. Ridée ou en surpoids, j’ai dû choisir. Bref vous me conseillez quoi ? Botox ? Acide hyaluronique ? lifting complet ? Non pas que je sois contre la chirurgie esthétique notez bien. J’en ai même déjà fait l’expérience mais on ne se connaît encore pas assez pour que je vous confie tous mes secrets. La femme doit garder un peu de mystère, non ? Oui je sais j’ai le sens du teasing mais je vais pas vous laisser sur votre faim car avec ce que cela m’a coûté, j’aurai pu repeindre tout mon appart doré à l’or fin avec du Bisazza et du marbre de haut en bas. Donc ces 2 abdominoplasties, bah oui j’en ai fait car ma pauvre Lucette, faut souffrir pour être belle. Enfin belle, c’est plutôt lookée « sortie d’Aquaboulevard » avec des tuyaux partout qui sortent du ventre, appelés « drains » et qui vous donnent l’impression d’accoucher une nouvelle fois quand l’infirmière vous les retire avec la délicatesse d’un viking. Et la cicatrice on en parle ? De la taille de la muraille de Chine qui vous balafre le corps de gauche à droite et de droite à gauche, cette cicatrice qu’on vous a promis « cachée par le slip, chère Madame ». On a juste oublié de vous préciser que ce serait pas par un tanga mais plutôt une bonne gaine playtex version taille haute. Merci Docteur. 

On va arrêter de se plaindre ! Je commence l’année 2020 avec vous, les 20 + 20, les Quadra, mais pas que ! Vous aussi mesdames trentenaires qui vous posez la question cruciale : quand vais-je faire cet enfant ? comment elles ont fait mes aînées ? Et puis vous aussi, les quinquas, qui nous regardez avec bienveillance en nous disant « vous avez fait comme vous avez pu et c’est très bien comme ça. Vous êtes la génération qui s’est battue contre le concept de la mère parfaite et vous avez parfaitement réussi le combat ! Informez et transmettez à celles qui suivent ! ». 

Si je suis féministe mais pas activiste, j’invite les hommes à nous rejoindre pour mieux nous comprendre, mieux gérer nos courbes hormonales, bref, nous aimer. L’année va être belle puisqu’elle commence avec nous !

Et en même temps fuck : Un podcast écrit par Esther Pi, assistante de production Méline Iscache, sous la relecture attentive de Sandrine Del Sol, illustration Marie Félix et musique originale Many Kinds Design.

Image Illustration Sylvie Tittel pour Unsplash

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Sylvie Tittel

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